Il est rare que les personnes qui ont un cancer derrière elles reprennent leur vie comme avant

Les survivants du cancer ont ­besoin de soutien

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Édition
2017/11
DOI:
https://doi.org/10.4414/phc-f.2017.01537
Prim Hosp Care (fr). 2017;17(11):219-220

Affiliations
a Spécialiste Survivants du cancer, Ligue suisse contre le cancer, Berne; b Responsable Suivi, Ligue suisse contre le cancer, Berne

Publié le 14.06.2017

Retrouver une vie «normale» après la phase aiguë d’un traitement contre le cancer et faire face aux séquelles de la maladie ou des thérapies représente un sacré défi. A l’heure où les personnes qui survivent à la maladie sont de plus en plus nombreuses, la Ligue contre le cancer souhaite attirer l’attention sur la situation particulière de ce groupe de patients et présente des offres concrètes qui peuvent également intéresser les médecins.
Le nombre de nouveaux cas de cancer diagnostiqués a augmenté en Suisse et dans le monde ces trente dernières années. Ce phénomène s’explique par l’allongement de l’espérance de vie, la croissance et le vieillissement de la population, l’intensification des mesures de dépistage et une prise de conscience accrue de la maladie dans le public en général. Durant ce même laps de temps, d’immenses progrès ont par ailleurs été réalisés dans le diagnostic et le traitement des maladies cancéreuses [1].
Les concepts thérapeutiques multimodaux offrent à un nombre toujours plus grand de patients des possibilités de traitement à visée curative. Pour ce qui est des tumeurs incurables, de nouvelles formes de traitement, notamment au moyen de médicaments ciblés, permettent aujourd’hui d’en contrôler la croissance pendant des mois, voire des années dans de nombreux cas. Ainsi, le cancer se mue de plus en plus en maladie chronique, une maladie avec laquelle un nombre nettement plus élevé de patients vit désormais beaucoup plus longtemps que par le passé [1].

Près de 4% de survivants du cancer 
dans la population

Dans l’espace anglo-saxon, on désigne sous le nom de «cancer survivors» (survivants du cancer) les personnes chez qui un diagnostic de cancer a été posé à un moment ou à un autre de leur vie. Il s’agit là d’un groupe hétérogène de patients. Atteints de divers cancers et traités par des méthodes qui varient selon les cas, ils sont souvent, malgré ces différences, confrontés à des problèmes et à des symptômes similaires.
À l’heure actuelle, on estime qu’en Suisse et dans d’autres pays comme l’Allemagne, l’Italie, la Grande-
Bretagne, les pays scandinaves et les Etats-Unis, environ 4% de la population se classe dans la catégorie des survivants du cancer [2]. En Suisse, le nombre de personnes chez qui un cancer a été diagnostiqué par le passé est évalué à 320 000 environ. 55 000 ont reçu le diagnostic au cours des deux dernières années et nécessitent généralement encore une prise en charge et un suivi médical intensif. 60 000 ont appris le diagnostic il y a deux à cinq ans et ont encore besoin d’un suivi et de contrôles. Quant aux 200 000 personnes chez qui le diagnostic remonte à plus de cinq ans, elles sont généralement considérées comme «guéries». Mais même si le cancer a disparu, beaucoup souffrent de divers problèmes sur le plan physique et psychique [3].

Les séquelles d’un traitement contre 
le cancer

Les survivants du cancer peuvent souffrir d’effets secondaires durables et de complications tardives de leur cancer. Le risque de séquelles dépend du cancer lui-même et du type de traitement. La toxicité à long terme de la chimiothérapie et de la radiothérapie se manifeste souvent après plus de dix ans, à l’image d’autres répercussions de ces traitements.
Tous les systèmes d’organes peuvent être concernés par des troubles durables et des complications tardives, l’ampleur des problèmes allant des atteintes supportables aux symptômes extrêmement lourds. Les problèmes courants après une thérapie multimodale sont les suivants: atteintes cardiaques, pulmonaires et rénales; lésions cutanées et dentaires, lésions des muqueuses; troubles du métabolisme; neuropathies; œdèmes lymphatiques; atteintes auditives et oculaires; perte osseuse et musculaire; stérilité et problèmes sexuels; troubles du sommeil; fatigue; douleurs chroniques; anxiété, dépression; troubles cognitifs, notamment problèmes de concentration; troubles de la motricité fine; altération de l’image corporelle. Il n’est pas rare que ces troubles soient à l’origine de divers problèmes psychiques qui se répercutent de façon négative au niveau familial, social, professionnel et financier [4].

Des besoins importants et variables

À l’heure actuelle, on estime qu’il est rare que les personnes qui ont un cancer derrière elles reprennent leur vie comme avant [5]. Les survivants du cancer sont souvent en moins bonne santé et souffrent de limitations plus marquées au quotidien que la population en général. Un peu moins de 80% d’entre eux – hommes et femmes – font état de problèmes de santé la première année après la fin du traitement initial. Ce chiffre ne diminue que de façon marginale dans les dix ans qui suivent la thérapie: 70% des patients souffrent de séquelles de leur cancer ou se plaignent des répercussions du traitement, les problèmes de santé étant grosso modo aussi fréquents que les difficultés non médicales [4].
Les survivants du cancer ont par conséquent des besoins relativement importants et très variables en termes de soins et de prise en charge. En conséquence, ils consultent plus souvent leur médecin de famille ou un spécialiste que la population en bonne santé [1].

Le rôle des médecins de famille

Les médecins de famille jouent un rôle important dans l’accompagnement des survivants du cancer. Dans l’idéal, ils sont régulièrement informés de l’évolution lors du traitement aigu. Au terme des thérapies en particulier, ils soutiennent les survivants du cancer, en partie avec les oncologues, durant la phase de transition vers une nouvelle normalité. Si, durant cette ­période, l’interprofessionnalité revêt également une importance fondamentale, à long terme, ce sont les médecins de famille qui assurent le suivi. Ils contribuent dans une large mesure à ce que les survivants du cancer relèvent le mieux possible les défis qui se posent au niveau de leur santé et sur le plan psychosocial.
Les médecins de famille peuvent aiguiller leurs patients vers la Ligue contre le cancer de leur région pour les questions en lien avec la gestion de la maladie et ses conséquences et les problèmes d’assurances sociales, ainsi que pour des conseils en vue de la réinsertion professionnelle, des conseils psycho-oncologiques ou encore des cours et des stages particuliers.

Reprise de la vie professionnelle

Après un cancer, la reprise de la vie active peut se révéler difficile. Le travail étant un facteur d’intégration sociale important, il est bon que les personnes concernées puissent continuer leur activité professionnelle pendant le traitement ou retrouver leur poste au terme de celui-ci. Mais le maintien ou la reprise de la vie active constitue un défi tant pour l’employeur que pour les employés. Pour les épauler, la Ligue contre le cancer leur propose un coaching téléphonique, l’objectif étant d’améliorer la compréhension mutuelle et de montrer des pistes pour poursuivre les rapports de travail.
Les survivants du cancer sont toujours plus nombreux. Leur situation mérite toute notre attention pour que nous puissions les aider à retrouver la meilleure qualité de vie possible.

Offre de cure à Bad Zurzach

Les médecins peuvent désormais proposer et prescrire une cure à Bad Zurzachaux personnes qui, des mois ou des années ­après leur traitement contre le cancer, continuent à souffrir de fatigue tenace et/ou de troubles chroniques du sommeil, de sautes d’humeur marquées, de limitations dans leur motricité ou leur mobilité au quotidien ou d’une baisse de leurs capacités. La RehaClinic composera, sur la base de leurs indications, un programme personnalisé pour chaque patient. Les coûts des soins médicaux et des thérapies durant la cure sont remboursés par les caisses-maladie. Certains assureurs participent aux frais du séjour hôtelier au Parkhotel de Bad Zurzach et la Ligue suisse contre le cancer est également prête à octroyer un soutien financier.
Pour en savoir plus sur le coaching proposé aux employeurs et employés: www.primary-hospital-care.ch/de/online-magazin ou  www.liguecancer.ch/employeurs.
Les auteurs n’ont déclaré aucun lien financier ou personnel en rapport avec cet article.
Anna Barbara Rüegsegger
Ligue suisse contre le cancer
spécialiste Survivants du cancer
Effingerstrasse 40
CH-3001 Bern
annabarbara.rueegsegger[at]liguecancer.ch
1 Ess SM, Herrmann, C. «Cancer Survivors» – eine stark wachsende Bevölkerungsgruppe. Bulletin suisse du cancer, 2014;34(4):281–4.
2 Lorez M, Heusser R, Arndt, V. Prevalence of Cancer Survivors in Switzerland. Bulletin suisse du cancer, 2014;34(4):285–9.
3 Arndt V, Feller A, Hauri D, Heusser R, Junker C, Kuehni C, et al. Le cancer en Suisse, rapport 2015: état des lieux et évolutions. Neuchâtel: Office fédéral de la statistique (OFS), Institut national pour l’épidémiologie et l’enregistrement du cancer (NICER), Registre suisse du cancer de l’enfant (RSCE). 2016.
4 Schilling G, Stein A, Quidde J, Bokemeyer C. Survivorship-Programme. FORUM, 2014;29(3):202–5. Doi: 10.1007/s12312-014-1111-5.
5 Mayer DK, Nasso SF, Earp JA. Defining cancer survivors, their needs, and perspectives on survivorship health care in the USA. Lancet Oncol. 2017;18(1):e11-e18. Doi: 10.1016/S1470-2045(16)30573-3.