Prévention du cancer du côlon: faut-il toujours réaliser une coloscopie?
Test immunologique fécal (semi-)quantitatif bien validé: qFIT

Prévention du cancer du côlon: faut-il toujours réaliser une coloscopie?

Offizielle Mitteilungen
Édition
2018/03
DOI:
https://doi.org/10.4414/phc-f.2018.01710
Prim Hosp Care (fr). 2018;18(03):43-44

Affiliations
Facharzt für Innere Medizin und Gastroenterologie, Kantonsspital Uri

Publié le 07.02.2018

Chaque année, en Suisse, environ 4100 personnes développent un cancer du côlon et environ 1600 en décèdent. Pas moins de 5% de la population suisse est confrontée à ce diagnostic au cours de sa vie. Etant donné que le taux de ce cancer augmente avec l’âge, le cancer du côlon et sa prévention revêtent une importance croissante dans notre société vieillissante.
Le traitement du cancer du côlon est lourd et onéreux. Toutefois, si la maladie est décelée précocement, elle peut être guérie sans recours à la chimiothérapie dans plus de 90% des cas. Sans prévention, moins de 20% des cas sont découverts à un stade aussi précoce; grâce à la prévention, ce taux si situe aux alentours de 70% [1]. En outre, la coloscopie permet de réséquer de nombreux adénomes (c.-à-d. des précurseurs de cancer potentiels) et bien souvent de prévenir l’apparition d’un cancer du côlon. Aux Etats-Unis, où la prévention du cancer du côlon est menée de façon intensive depuis des années, le nombre de nouveaux cas a été pratiquement divisé par deux chez les plus de 55 ans [2].

Les tests immunologiques fécaux (semi-)quantitatifs (qFIT) sont très prometteurs

Les nouveaux tests immunologiques fécaux (semi-)quantitatifs qFIT (pour Quantitative Faecal Immunochemical Test) OC Sensor* et GOLD ont apporté une très bonne option de prévention, dont l’acceptation est croissante au sein de la population. Ces tests sont bien validés [3]. Dans de vastes études de dépistage prospectives, 70 à 80% des cas de cancer du côlon ont pu être détectés dès le premier test. Parmi ces tumeurs, 70% étaient de stade précoce (stade I), le plus souvent guérissable. Sur 9989 tests fécaux, pour une valeur seuil de 100 ng de sang/ml de tampon, seuls 472 résultats se sont avérés faussement positifs, c’est-à-dire que l’endoscopie n’a révélé ni carcinome, ni adénome significatif. Toutefois, un taux de coloscopies inutiles de moins de 5% indique également qu’un test positif doit impérativement être assorti d’une investigation endoscopique!
Etant donné que des grands polypes ou même des carcinomes peuvent passer inaperçus avec le test qFIT, il est absolument essentiel que le test soit répété tous les 2 ans.
Dans une étude néerlandaise lancée il y a maintenant 6 ans [4], selon les estimations, sur 10 000 personnes, 86 carcinomes ont été découverts sur cette période avec le test qFIT comme mesure de prévention (52% au stade I, 3% avec métastases à distance), et 109 sans mesure de prévention (16% au stade I, 21% avec métastases à distance). Les personnes chez qui un cancer du côlon a été découvert à l’occasion du dépistage survivaient significativement plus fréquemment que celles chez qui il n’y avait pas eu de dépistage (79/86 [93%] vs 44/109 [40%]).

Coloscopie ou bien test immunologique fécal quantitatif?

Le principal avantage du test qFIT est sa simplicité d’utilisation, raison pour laquelle il est mieux accepté comme méthode de prévention. Dans une étude de population randomisée actuellement en cours dans le sud de l’Espagne [5], cette meilleure acceptation a permis, dès la première vague de dépistage, de trouver plus de carcinomes dans le groupe qFIT que dans le groupe de coloscopie. Pour les deux modalités de dépistage, 70% des carcinomes trouvés étaient à un stade I le plus souvent guérissable. Il est essentiel que les gens se soumettent à un qFIT tous les 2 ans. Pour y parvenir, il est nécessaire que ces individus soient convoqués personnellement et que le test leur soit adressé si possible tout de suite.
La coloscopie, pour sa part, ne passe qu’extrêmement rarement à côté d’un cancer du côlon, ce qui est en revanche le cas dans 20 à 30% des tests qFIT. En outre, un examen endoscopique permet de trouver plus de deux fois plus de grands adénomes [5], raison pour laquelle la prévention du cancer du côlon au moyen de l’endoscopie pourrait être plus efficace. Toutefois, même avec une «coloscopie tous les 10 ans», des carcinomes peuvent être manqués (carcinomes d’intervalle) [6, 7]. 5 à 10% des cancers du côlon surviennent en dépit d’une prévention endoscopique de qualité. Il existe des adénomes, tels que les adénomes festonnés sessiles, dont la croissance est plus rapide et qui échappent au dépistage décennal. Aux alentours de 2022, les études de population randomisées actuellement en cours nous livreront un comparatif définitif des méthodes de prévention. Même si la prévention est bonne, elle n’est utile que si les personnes y participent.
Le traitement du cancer du côlon coûte aujourd’hui en moyenne 100 000 francs, avec une tendance à la hausse. Grâce à la prévention du cancer du côlon, il est non seulement possible de guérir plus de personnes et d’éviter les chimio- et radiothérapies, mais cela permet également de réaliser des économies. Depuis 2013, la prévention du cancer du côlon au moyen de coloscopie ou du test fécal (recherche de sang) est à la charge des caisses-maladie pour les personnes de 50 à 69 ans.

Résumé

Le test qFIT offre une très bonne prévention du cancer du côlon, validée dans des études de population. L’acceptation est nettement meilleure que pour l’endoscopie et, en cas de réalisation régulière (tous les 2 ans), peu de carcinomes passent inaperçus.
Pour la prévention du cancer du côlon ainsi que pour la mise au point en raison de symptômes, l’endoscopie reste la méthode de choix. Avant tout chez les personnes à risque accru de cancer du côlon, l’endoscopie doit impérativement être recommandée en tant que méthode de prévention.
Sandra Hügli-Jost
Responsable ­communication
mfe – Médecins de famille et de l’enfance Suisse
Secrétariat général
Effingerstrasse 2
CH-3011 Berne
Sandra.huegli[at]hausaerzteschweiz.ch
 1 Manser CN, Bachmann LM, Brunner J, et al. Colonoscopy screening markedly reduces the occurrence of colon carcinomas and carcinoma-related death: a closed cohort study. Gastrointest Endoscopy. 2012;76:110–7.
 2 Siegel RL, Fedewa SA, Anderson WF, et al. Colorectal cancer CRC incidence in the USA 1974–2013. J Natl Cancer Instit 2017;109:djw322
 3 Imperiale TF, Ransohoff DF, Itzkowitz SH, et al. Multitarget stool DNA testing for colorectal-cancer screening. N Engl J Med. 2014;370:1287–97.
 4 Van der Vlugt M, Grobbee EJ, Bossuyt PMM, et al. Interval colorectal cancer incidence among subjects undergoing multiple rounds of fecal immunochemical testing. Gastroenterology. 2017;153:439–47.
 5 Quintero E, Castells A, Bujanda L, et al. Colonoscopy versus fecal immunochemical testing in colorectal-cancer screening. N Engl J Med. 2012;366:697–706.
 6 Corley DA, Jensen CD, Marks AR, et al. Adenoma detection rate and risk of colorectal cancer and death. N Engl J Med. 2014;370:1298–306.
 7 Samadder NJ, Curtin K, Tuohy TM, et al. Characteristics of missed or interval colorectal cancer and patient survival: a population-based study. Gastroenterology. 2014;146:950–60.