Troubles post-traumatiques en médecine générale
Egalement suite aux soins intensifs

Troubles post-traumatiques en médecine générale

Lernen
Édition
2018/12
DOI:
https://doi.org/10.4414/phc-f.2017.01759
Prim Hosp Care Med Int Gen. 2018;18(12):212-216

Affiliations
a Institut für Allgemeinmedizin, Universitätsklinikum Jena, Friedrich Schiller Universität, Jena; b Institut für Allgemeinmedizin, Charité, Universitätsmedizin, Berlin; c Institut für Allgemeinmedizin, Klinikum der Ludwig-Maximilians-Universität, München

Publié le 27.06.2018

Les expériences traumatiques peuvent avoir des répercussions à long terme non seulement sur la santé psychique, mais aussi sur la santé physique. De nombreux patients atteints de troubles post-traumatiques sont pris en charge au cabinet de médecine de famille. Ce que nous savons moins, c’est que les interventions médicales, telles que les soins intensifs, peuvent également entraîner des troubles de stress post-traumatique.

Vignette clinique

En 2006, Clara Wiener (le nom a été modifié), alors âgée de 25 ans, a été victime d’un accident de la circulation alors qu’elle se rendait au travail. Elle a souffert d’un polytraumatisme avec atteinte cranio-cérébrale, contusion pulmonaire et hémopneumothorax consécutif. Elle a été transportée par un hélicoptère de sauvetage jusqu’à l’unité de soins intensifs la plus proche, où elle a été mise sous ventilation artificielle. Peu de temps après, suite à une infection nosocomiale, elle a été victime d’un choc septique avec délire.
Elle n’a pu quitter le service que 25 jours après. Bien qu’elle se soit en grande partie rétablie sur le plan physique, aujourd’hui, Clara Wiener n’est plus la même jeune femme qu’avant l’accident. Elle se montre craintive et angoissée vis-à-vis de tout ce qui lui rappelle le temps qu’elle a passé en unité de soins intensifs. La nuit, elle se réveille souvent en sueur. «J’ai développé une peur phobique des bruits d’hélicoptère». Ou encore: «Quand je vois un liquide corporel rouge ou quelque chose de similaire…». Pour elle, ce sont les principaux éléments déclencheurs. «Les images qui me viennent en tête sont effroyablement réelles… Maintenant, je ne peux plus sortir seule». Pendant des années, des arrêts maladie se sont enchaînés. Une procédure de rente a même été initiée [1].

Prévalence

Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) compte parmi les maladies psychiques fréquentes. La prévalence au sein d’une population dépend avant tout de la fréquence cumulée des événements traumatiques et varie en conséquence très fortement à travers le monde. Ainsi, les estimations de la prévalence dans les soins primaires varient entre 8 et 23% selon le contexte socio-économique, l’origine, et les différences démographiques dans les populations d’étude [2–4]. En 2004, une étude transversale suédoise a révélé une prévalence vie entière du TSPT de 5,6% au sein de la population normale, avec un rapport femme/homme de 2:1. Au Rwanda, dévasté par la guerre civile, la prévalence ponctuelle en 2012 était en revanche déjà de 26,1% [5]. Pour la Suisse, une étude transversale menée en 2008 dans le canton de Zurich a montré, chez les personnes de plus de 65 ans, une prévalence ponctuelle de seulement 0,7% pour le tableau clinique complet de TSPT et de 4,2% pour le TSPT latent, ce qui s’explique potentiellement par l’absence des effets directs de la guerre en Suisse [6]. Ces données ne sont toutefois pas extrapolables à la situation actuelle, avec des chiffres croissants de migrations et de réfugiés.
Le TSPT n’est que rarement décelé et, la plupart du temps, il est insuffisamment traité. Selon des études réalisées aux Etats-Unis et en Israël, seuls env. 3 à 11% des patients du cabinet de médecine de famille atteints de TSPT se voient effectivement poser ce diagnostic [3, 4]. Un délai moyen de 12 ans s’écoule jusqu’à ce que la première discussion professionnelle à propos de la maladie soit conduite [7].
Les psychotraumatismes restreignent souvent la santé psychique et physique de façon globale: jusqu’à 90% des patients atteints de TSPT présentent des symptômes d’autres maladies psychiatriques [8]. Il s’agit avant tout de dépressions, de troubles anxieux, de troubles psychosomatiques et d’abus de substances. Le stress post-traumatique devenu chronique peut, par le bais du mécanisme d’activation du stress traumatique, conditionner et influencer l’évolution de maladies physiques, par ex. cardiovasculaires. Dans le cadre des maladies organiques sévères et chroniques, il n’est pas rare que des événements traumatiques aient eu lieu longtemps auparavant [9].

Evénements déclencheurs

Dans la 10e révision de la Classification internationale des maladies (CIM-10), le psychotraumatisme en tant qu’événement déclencheur d’un TSPT est défini comme «une situation ou un événement stressant (de courte ou de longue durée), exceptionnellement menaçant ou catastrophique et qui provoquerait des symptômes évidents de détresse chez la plupart des individus». D’après une étude américaine, environ 50–90% des individus d’une population sont confrontés à un tel événement au moins une fois au cours de leur vie, le plus fréquemment dans le cadre d’un accident de la circulation [10]. Néanmoins, de nombreuses personnes ne développent pas de symptômes psychiques à la suite d’un tel événement. La plupart du temps, les expériences peuvent être intégrées. Comme le montre la figure 1, les évolutions sont très variables. Alors que les réactions aiguës au stress et les troubles de l’adaptation régressent après un temps de latence de 1–6 mois et ne nécessitent en règle générale pas de traitement psychiatrique spécialisé [11], le TSPT persiste souvent pendant des années [12].
Figure 1: Les réactions à des traumatismes peuvent présenter de multiples évolutions: une compensation peut se produire pour tous les tableaux cliniques, quel qu’en soit le degré de sévérité. Il convient également de tenir compte des comorbidités psychiatriques le plus souvent élevées. Reproduction avec l’aimable autorisation de: Flatten G, Gast U, Hofmann A, Knaevelsrud C, Lampe A, Liebermann P, Maercker A, Reddemann L, Wöller W. S3-Leitlinie Posttraumatische Belastungsstörung. Trauma & Gewalt, 2011. [12]
Le plus souvent, les traumatismes provoqués par des personnes, tels que le viol, la guerre, ainsi que la maltraitance et la négligence pendant l’enfance, sont associés à une grande anxiété, à une détresse et à une excitation émotionnelle, ce qui accroît le risque de développer un TSPT. Les déclencheurs constituant des «événements de force majeure», tels que les incendies et les catastrophes naturelles, ou encore les accidents, n’arrivent qu’en seconde place [13]. Outre cette classification basée sur les causes, on distingue les traumatismes de type I, décrivant des traumatismes «à court terme» faisant suite à un événement aigu, et ceux de type II, décrivant des traumatismes «à long terme» lors desquels différents événements traumatisants sont subis à répétition [14]. Vivre un grand nombre de traumatismes est associé à une plus grande probabilité de durabilité des symptômes [15].
Sur le plan neurophysiologique, le développement de troubles post-traumatiques s’explique par des «réseaux de la peur» qui, en réaction au stress, sont mis en place pendant l’événement traumatique par le corps et la mémoire de façon associative, et non pas de façon contextuelle et ordonnée. Ainsi, le souvenir de tels événements n’est enregistré que de façon fragmentée, et l’ensemble du «réseau de la peur» peut soudainement être activé inconsciemment en fonction de la situation par des stimuli déclencheurs, tels que des bruits, des odeurs, des postures corporelles ou des situations comparables [16].

Symptômes

Les patients atteints de TSPT souffrent d’une constellation typique de symptômes. La plupart du temps, ces symptômes doivent faire l’objet d’une interrogation active, car de nombreux patients évitent d’en parler.
Au premier-plan figurent les intrusions, des souvenirs de l’évènement traumatique qui sont envahissants et vécus de façon réelle, y compris dans les cauchemars. Elles sont la plupart du temps déclenchées par des stimuli associés au traumatisme (stimuli déclencheurs). Pour cette raison, les patients évitent consciemment les activités, situations ou lieux qui leur rappellent les expériences traumatiques (avoidance). Dans le même temps, les personnes touchées souffrent du sentiment d’être comme anesthésiées, et d’un «émoussement» émotionnel (numbing). Elles développent également une apathie et une indifférence croissantes envers les autres. En termes psychodynamiques, cela correspond probablement à une réaction de protection. S’y ajoutent des symptômes végétatifs d’hyperactivation (arousal), tels que sursauts, irritabilité accrue, tachycardie ou troubles du sommeil.
Après un traumatisme prolongé ou sévère, les patients souffrent souvent de symptômes supplémentaires pour lesquels le diagnostic de trouble de stress post-traumatique complexe (TSPT-C) a été proposé. Peuvent alors survenir des troubles de la régulation de l’affect, des symptômes dissociatifs, des troubles somatiques, des altérations de l’auto-perception, de la sexualité et de l’organisation relationnelle, ainsi que des changements des convictions ou valeurs personnelles [17].

Troubles suite à des soins intensifs

La survenue de troubles post-traumatiques suite à des mesures médicales invasives, comme c’est en particulier le cas dans le cadre des soins intensifs, est pour l’heure peu connue. La maladie souvent grave et les mesures thérapeutiques intensives souvent invasives soumettent les patients à un stress extrême. La ­suppression du rythme jour/nuit, le niveau sonore constamment élevé lié aux appareils, l’intubation et la ventilation mécanique y contribuent notamment. Une peur existentielle et une détresse peuvent également naître du fait de la limitation fonctionnelle sévère en cas d’immobilisation, de l’incertitude quant à son propre pronostic, et de l’éventuelle observation du destin difficile d’autres patients. A un tel niveau de stress, les images et événements chargés d’émotions ne peuvent plus être ordonnés dans le contexte cognitif spatio-temporel. Ce phénomène est renforcé par l’administration de sédatifs ainsi que par l’état confusionnel aigu fréquent induit par les soins intensifs. Comme après d’autres psychotraumatismes, un réseau de la peur se met en place et des années plus tard, il peut encore être activé par des stimuli déclencheurs, tels que le bip d’un moniteur, et faire revivre encore et toujours les événements vécus en unité de soins intensifs de ­façon réelle.
Les troubles post-traumatiques sont désormais reconnus comme des symptômes typiques du «syndrome post-soins intensifs» (post-intensive care syndrome, PICS). Ce dernier décrit des restrictions physiques, cognitives ou psychiatriques nouvellement survenues ou dont l’ampleur est croissante et qui – induits par une maladie critique – persistent après le traitement aigu [18]. Chez les personnes ayant survécu à une maladie critique requérant des soins intensifs, la prévalence ponctuelle médiane des TSPT est d’env. entre 17 et 44% [19]. Les facteurs de risque comprennent la durée de la sédation et de la ventilation artificielle, l’administration de ­benzodiazépines et les maladies psychiatriques préexistantes [20]. Chaque expérience traumatique préexistante dans l’histoire du patient accroît considérablement la vulnérabilité quant à un TSPT [21].
Pendant l’enfance, les symptômes peuvent en partie se manifester différemment (par ex. événement traumatique rejoué par l’enfant de façon répétée ou autres anomalies comportementales).
Les proches, par leur statut de témoins, peuvent également présenter des symptômes similaires induits par le stress [22]; on parle même de «post-intensive care syndrome-­family» (PICS-F) [23].

Diagnostic

La première manifestation survient typiquement de manière retardée et prolongée après l’événement traumatisant; jusqu’à 6 mois peuvent s’écouler. Dans la mesure où, à ce moment-là, la majorité des patients sont déjà pris en charge par le médecin de famille, le dépistage et l’identification du traumatisme devraient être ­effectués dans le cadre des soins de premier recours. Une absence de diagnostic ou un diagnostic tardif ­empêchent une intervention thérapeutique adéquate. Par conséquent, le médecin de famille joue un rôle clé dans la détection précoce et le traitement des troubles post-traumatiques. A cet effet, une perception subtile du patient ainsi qu’un questionnement actif sont essentiels, car les symptômes se présentent bien souvent de façon masquée et ne sont guère communiqués par les patients en raison d’un comportement d’évitement symptomatique. Les signes évocateurs de troubles post-traumatiques peuvent être les suivants: repli social, sentiment d’insensibilité et d’indifférence, besoin de contrôle, sursauts, agitation ou signes de torpeur [24].
Etant donné que le tableau symptomatique se manifeste souvent parallèlement à des comorbidités, telles que la dépression, les troubles anxieux, la somatisation et l’abus de substances, il est souvent compliqué de poser le bon diagnostic (de nombreux patients atteints de TSPT sont traités pendant des années pour une dépression, un syndrome du côlon irritable ou des douleurs chroniques). La recherche d’événements traumatisants dans le passé peut ici fournir des pistes [25].
Si la suspicion d’un TSPT se confirme, deux questionnaires peuvent être utiles; ceux-ci ont été développés pour le dépistage en soins de premier recours et sont recommandés sur la base d’une revue systématique récente [26]: Le «Primary Care-PTSD-Screen» (fig. 2) ainsi que la «PTSD Checklist» constituent des instruments d’auto-évaluation faciles à utiliser et simples à interpréter [27].
Figure 2: Le «Primary Care PTSD-Screen» comme exemple d’instrument de dépistage adapté à la pratique en soins de premiers recours: si la réponse est «oui» à trois questions ou plus, un diagnostic plus approfondi est recommandé. Reproduction avec l’aimable autorisation de: Schäfer I, Schulze C (2010). Version allemande du «Primary Care Posttraumatic Stress Disorder screening questionnaire». Université de Hambourg. [27]
En cas de dépistage positif, un entretien diagnostique est ensuite réalisé pour la pose définitive du diagnostic. Les critères diagnostiques d’un TSPT (F43.1) selon la CIM-10 sont les suivants [12]:
– Début des symptômes au cours des 6 mois suivant un événement traumatisant;
– Souvenirs envahissants (flashbacks, intrusions, cauchemars) de cet événement;
– Comportement d’évitement vis-à-vis des circonstances qui s’apparentent à l’événement traumatisant;
– Au moins un des critères suivants (1. ou 2.) est rempli:
1. Incapacité à se souvenir de certains aspects de l’événement traumatisant;
2. Symptômes durables d’excitation psychique accrue, avec au moins deux des caractéristiques suivantes:
• Troubles de l’endormissement et de la continuité du sommeil
• Sursauts
• Hypervigilance
• Difficultés de concentration
• Irritabilité et accès de colère
Il convient de faire la distinction avec les réactions ­aiguës à un facteur de stress (F43.0) et les troubles de l’adaptation (F43.2). Une réaction aiguë à un facteur de stress ne survient qu’à court terme et directement après un événement traumatique, ce qui rend déjà possible la différenciation vis-à-vis du TSPT grâce au déroulement chronologique. Il existe souvent une confusion initiale, suivie soit d’un repli, soit d’une hyperactivité. Compte tenu de la rémission spontanée en cas de ­réaction aiguë à un facteur de stress, seules des mesures thérapeutiques à court terme, telles que les dialogues de soutien ou une médication sédative à court terme, sont nécessaires. Toutefois, un TSPT peut encore se ­développer par la suite, ce qui rend pertinente la ­poursuite de la surveillance active par le médecin de famille.
Un trouble de l’adaptation surgit après des changements de vie qui ne correspondent pas nécessairement à la sévérité de la définition de traumatisme selon la CIM-10. Il peut également survenir de façon retardée et avoir un impact psychique sur les patients. Une constellation symptomatique typique du TSPT avec intrusions et comportement d’évitement n’est toutefois pas présente. Les interventions de crise et la thérapie par le dialogue peuvent s’avérer utiles [28].
L’ensemble des patients doivent être interrogés sur la présence d’un traumatisme potentiellement durable (par ex. en cas de violence domestique) afin d’initier le cas échéant des mesures de soutien adaptées.

Traitement

Pour traiter les TSPT, il convient de recourir à une psychothérapie, le cas échéant avec pharmacothérapie d’accompagnement afin de soutenir le contrôle des symptômes [12]. Une pharmacothérapie seule est obsolète.
Il existe aujourd’hui de nombreuses formes différentes de psychothérapie basée sur l’évidence. Les plus répandues sont les approches de thérapie cognitivo-comportementale (TCC), avec ou sans focalisation sur le traumatisme/l’exposition [29-31]. Outre la TCC, il convient avant tout de mentionner l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing), une forme thérapeutique à première vue insolite lors de laquelle le patient se concentre sur les souvenirs traumatiques et suit simultanément des yeux les mouvements du doigt du thérapeute [32]. La thérapie d’exposition narrative (NET), développée à l’université de Constance, combine une documentation détaillée de l’histoire personnelle (testimony therapy) à un récit détaillé (narration) fait par le patient afin de réintégrer les fragments de souvenirs traumatisants dans la mémoire [16, 33]. L’objectif de tous ces traitements est de permettre au patient de réorganiser ses souvenirs traumatiques et de réduire voire contrôler la survenue des réactions qui les accompagnent [34].
Toutefois, même dans le meilleur des cas, à savoir la pose rapide du diagnostic, les délais d’attente pour les psychothérapies sont longs. En Allemagne, il faut compter en moyenne 6 mois avant de pouvoir commencer une thérapie indiquée [35]. Les nouveaux modèles thérapeutiques pouvant d’ores et déjà être utilisés dans les soins de premier recours n’ont pour le moment été testés que dans les études américaines, avant tout pour les vétérans traumatisés de guerre [36].
Au sein de cinq cliniques universitaires allemandes a démarré cette année une étude interventionnelle dans laquelle des patients souffrant de troubles post-traumatiques suite à des soins intensifs sont traités par leur médecin de famille sur la base de la thérapie d’exposition narrative [37].
Avant que de tels modèles puissent éventuellement devenir des soins ordinaires, les médecins de famille devraient initier les premières mesures de soutien dans le cadre des soins psychosomatiques de premier recours [24]. Ce faisant, il est essentiel de recueillir l’anamnèse avec attention, car la simple mention du vécu peut déclencher un nouveau traumatisme. Il convient ici dans un premier temps de laisser au patient le choix de raconter ou non, et le choix de ce qu’il souhaite et peut raconter. Avant l’exposition thérapeutique plus tardive, le médecin de famille peut tenter d’évaluer les ressources personnelles du patient et le cas échéant de les renforcer. Toutefois, il est fréquent que la seule stabilisation n’entraîne pas d’amélioration du tableau clinique [38]. Etant donné que les patients, en raison de leur comportement d’évitement, adoptent souvent une position ambivalente vis-à-vis de la thérapie avec exposition, le médecin de famille peut ici les motiver de manière ciblée: La psychoéducation au sujet de la relation entre traumatisme et symptômes psychiques et somatiques [39] et de la perspective de réduction des troubles par la confrontation avec le vécu est judicieuse [38]. La relation médecin-patient empathique généralement de longue date au sein du cabinet de médecine de famille, avec une bonne connaissance de la biographie individuelle du patient, constitue ici une bonne base. Des rendez-vous réguliers, même sans rapport avec les troubles actuels, se sont avérés utiles [11].
La présence d’un soutien social est un facteur protecteur essentiel pour l’instauration d’un environnement sûr. Pour la mise en relation du patient avec un système ­local d’aide psychosociale également, le médecin de ­famille joue un rôle essentiel, en incluant notamment des personnes de référence importantes, des organisations d’aide, des centres de conseil et des directeurs de conscience. Pour accompagner un patient sur sa voie, il faut parfois faire preuve de beaucoup de patience et de tolérance à la frustration, tout en réfléchissant continuellement aux possibles implications dans la relation médecin-patient (fig. 3) [40].
Figure 3: Interventions possibles en médecine de famille en cas de troubles post-traumatiques. Abréviations: ESPT = état de stress post-traumatique; TSPT = trouble de stress post-traumatique; TSPT-C = trouble de stress post-traumatique complexe. Avec l’aimable autorisation d’après: Reddemann O. Psychotrauma, (post)traumatischer Stress und Traumafolgestörungen in der hausärztlichen Versorgung, Ärztliche Psychotherapie 2016;11 4:192–8. [11]
En fin de compte, la psychothérapie spécifique aux traumatismes par des thérapeutes spécialement formés reste toutefois la seule méthode curative à ce jour. La compétence du médecin de famille est également requise pour l’information du patient et le choix de l’offre adéquate (psychothérapeute ou psychiatre, en ambulatoire, stationnaire ou semi-stationnaire, procédé thérapeutique, etc.). Chez les patients âgés et à mobilité réduite, il ne reste parfois que le soutien respectueux et facilement accessible du médecin de famille [41].
Comme traitement médicamenteux, en particulier en cas de dépression concomitante, les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (et de la noradrénaline) sont recommandés (ISRS/ISRN) [34, 42]. Chez certains patients, ils réduisent les peurs et les flashbacks, mais également les sentiments d’insensibilité et de perte d’intérêt. En cas de troubles du sommeil, la mirtazapine peut éventuellement être prescrite. En raison de leurs effets indésirables, les autres médicaments ne devraient être prescrits qu’en accord avec des thérapeutes spécialisés. Les benzodiazépines, par exemple, sont contre-indiqués, car ils renforcent les phénomènes dissociatifs et présentent un potentiel de dépendance accru [12].

Résumé

Le TSPT est une affection souvent sévère et diagnostiquée tardivement. Les mesures médicales, telles que le traitement intensif, peuvent elles aussi s’avérer traumatisantes. Pour le dépistage dans le cadre des soins de premier recours, il existe désormais des questionnaires faciles d’utilisation et ayant fait l’objet d’évaluations. Du point de vue diagnostique, l’exploration active des événements traumatiques et des symptômes typiques est indispensable. Le médecin de famille, en tant qu’interlocuteur de premier plan après un potentiel traumatisme, peut déjà apporter un soutien psychosocial essentiel.
Dr. med. Konrad Schmidt
Bachstrasse 18
DE-07743 Jena
Konrad.Schmidt[at]med.uni-jena.de
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