Méningo-encéphalite à tiques (FSME) et vaccination contre la FSME

Fortbildung
Édition
2022/06
DOI:
https://doi.org/10.4414/phc-f.2022.10488
Prim Hosp Care Med Int Gen. 2022;22(06):178-184

Publié le 08.06.2022

Update pour la pratique

Introduction

Depuis 2017 au moins, les cas de FSME déclarés en Suisse sont en augmentation. En 2020, 425 cas ont été déclarés, soit le chiffre le plus élevé depuis l’introduction de la déclaration obligatoire (1988) [1]. La saison durant laquelle les tiques sont particulièrement actives commence en mars et se termine en novembre, selon les conditions météorologiques; la plupart des cas de FSME surviennent entre mai et août [1]. De plus, les zones à risque de FSME se sont étendues en Suisse: actuellement, seuls le Tessin et Genève sont considérés comme exempts de FSME [2, 3]. L’objectif de cet article est de présenter les informations pertinentes pour la pratique concernant l’épidémiologie, la clinique, le diag­nostic et la prévention de la maladie FSME – afin de pouvoir entre autre se décider pour ou contre la vaccination. Nous avons parlé de la borréliose dans les numéros d’avril et de mai 2022 de PHC.

Série Infectiologie

Dans la pratique, les infections et les défenses immu­nitaires sont des thèmes centraux. Ils offrent d’ex­cellentes opportunités de collaboration interdisciplinaire, de vérification de concepts courants et d’intégration de méthodes des médecines complémentaires. Philip Tarr est interniste et infectiologue à ­l’hôpital cantonal de Bâle-­Campagne, et il mène un programme national de recherche PNR 74 sur le scepticisme vis-à-vis des vaccins. Il attache beaucoup d’importance à une médecine centrée sur les patients ainsi qu’à des ­articles pertinents pour la pratique, que nous allons publier régulièrement dans cette série du Primary and Hospital Care.

Épidémiologie

Existe-t-il encore des zones exemptes de FSME en Suisse?

Selon les données de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), les tiques vivent jusqu’à 2000 m d’altitude [4, 5]. La figure 1A montre les lieux présumés de piqûre de tiques parmi les cas de FSME déclarés [2]; la répartition est très lacunaire dans toute la Suisse. Toutefois, nous nous retrouvons assez rapidement dans une région où des piqûres de tiques ont été déclarées – dans un cadre professionel, de l’école ou des activités de loisirs. Ainsi, la désignation de la quasi-totalité de la Suisse comme zone à risque de FSME, avec la recommandation de vaccination correspondante de l’OFSP, semble être une solution raisonnable et pragmatique (fig. 1B [2]). En 2019, des tiques infectées par la FSME ont en outre été détectées au Tessin [6].
Figure 1A: 
Localités présumés de piqûres de tiques parmi les cas de FSME déclarés (si aucun lieu de piqûre n'a été déclaré à l'OFSP: commune de résidence). Reproduit avec l'aimable autorisation de l'OFSP.
Figure 1B: 
Recommandation de vaccination contre la FSME («zones à risque de FSME»). Selon [2], reproduit avec ­l'aimable autorisation de l'OFSP.

Dans quels pays puis-je contracter la FSME en cas de piqûre de tique?

Dans une grande partie de l’Europe centrale, y compris dans le sud de la Scandinavie, dans les pays des Balkans et les pays Baltes, en Russie jusqu’au Japon et en Corée (fig. 2). 

J’ai lu que la FSME ne s’attrape pas uniquement via les tiques. Est-ce vrai?

De rares cas de transmission ont été rapportés après la consommation de produits laitiers crus, notamment de lait de chèvre [7–10]. La pasteurisation du lait inactive complètement le virus de la FSME [11].

Puis-je m’infecter lors d’une transfusion ­sanguine? 

Probablement pas [12], mais peut-être lors d’une transplantation d’organe [13, 14].
Figure 2: 
Propagation géographique de la FSME. © Valeria Tarr.

Un retrait précoce de la tique peut-il empêcher la transmission? 

Probablement pas. Le virus FSME est transmis en quelques minutes pendant la piqûre de tique, probablement parce que le virus vit dans l’appareil salivaire de la tique [15, 16]. Dans le cas de la borréliose, en revanche, le risque de transmission des borrélies augmente avec la durée d’attachement de la tique. Pour la transmission, un attachement d’au moins 16 heures est nécessaire, probablement parce que les spirochètes vivent dans l’intestin de la tique et ne passent chez l’homme qu’avec un certain délai [17–19].

Aspets cliniques

Quelle est la durée d’incubation?

Environ 7 à 14 jours (fourchette de 2 à 28 jours) [20, 21].

Existe-t-il des cas asymptomatiques de FSME?

Oui. Environ deux tiers des personnes infectées (séroconversions) sont asymptomatiques [2, 20–22].

Quelle est la clinique typique?

Une maladie non spécifique, «pseudo-grippale», avec fièvre, fatigue, faiblesse générale, maux de tête et douleurs articulaires d’une durée d’environ 5 (2–10) jours, suivie d’une amélioration spontanée [16, 23, 24]. Chez plus de 80% des patients, la maladie FSME est ainsi terminée et ils ne pensent même pas que cela aurait pu être la FSME [2]. De même, la sérologie est souvent encore négative pendant la phase grippale [24, 25].

Les symptômes neurologiques sont-ils ­fréquents?

Après cette première phase grippale, seuls 5 à 15% des patients ont une évolution «biphasique» après 4 à 6 jours supplémentaires, avec une nouvelle augmentation de la fièvre et des symptômes neurologiques (tab. 1) [2, 16, 20, 24, 26–28].

Pourquoi l’OFSP recommande-t-il la vaccination FSME à bas seuil?

Pour prévenir ces maladies neurologiques rares mais parfois graves, car il n’existe pas de traitement pour celles-ci [20].

Quelle est donc la probabilité de contracter la FSME après une piqûre de tique?

En Suisse, selon la région, entre 0,1% et 1% des tiques sont infectées par le virus FSME. Mais comme deux tiers des infections par la FSME sont asymptomatiques, le risque de maladie grippale ou neurologique est très faible (fig. 3) [29–31]. Nous ne disposons toutefois pas d’études suisses détaillées à ce sujet [24, 32], contrairement à la borréliose: le risque de séroconversion après une piqûre de tique est de 0,6–4,5% [33, 34], le risque clinique de borréliose est d’environ 0,8% [34, 35].
Figure 3: 
Représentation graphique du risque de contracter la FSME après une piqûre de tique, © Katia Boggian.

Comment distinguer la FMSE de la neuroborréliose?

Voir tableau 1. La distinction clinique peut être compliquée – d’où l’importance des tests de laboratoire pour les deux agents pathogènes en cas de suspicions.
Tableau 1: 
Manifestations cliniques de la FSME et de la neuroborréliose.
 Méningo-encéphalite à tiques (FSME)*Neuroborréliose (NB)**
Agent pathogèneVirus FSME (flavivirus)Borrelia (bactérie spirochète)
Période d’incubation7–14 jours (fourchette de –28 jours) après la piquûre de tique.NB précoce: de quelques semaines à quelques mois;NB tardive: des mois à plusieurs années après la piqûre de tique (généralement dans les 2–3 ans).
Symptômes typiquesD’abord semblable à la grippe (fièvre, fatigue, réduction de l’état générale, maux de tête, douleurs dans les membres).NB précoce: méningite, radiculite, déficits des nerfs crâniens (surtout parésie faciale périphérique)
 
5–15%: évolution biphasique avec symptômes neurologiques ***:
 
 
 Méningite (20–50%; entre autres fièvre, maux de tête, ­raideur de la nuque)
 NB tardive: encéphalomyélite progressive (démarche ataxique spastique, dysfonctionnement de la vessie, déficits cognitifs), polyneuropathie chronique (radiculite, paresthésies distales symétriques, souvent sans déficits moteurs).
 
Méningo-encéphalite (40–55%; entre autres ataxie, troubles de la conscience, paralysie des extrémités et des nerfs crâniens) ou
En plus de la NB, toujours se renseigner sur les autres manifestations de Borrelia, comme par exemple l’érythème ­migrant**
 
Méningoencéphalomyélite (3–10%; entre autres troubles de la conscience, paralysie des bras ou des jambes)
 
DiagnosticPersonnes non vaccinées: sérologie (anticorps IgM, pas d’anticorps IgG préexistants)Sérologie, parfois ponction lombaire (production d’anticorps intrathécaux)
 
Personnes vaccinées: ponction lombaire (production d’anticorps intrathécaux); Sérologie: forte augmentation initiale des IgG, parfois suivie d’une augmentation «tardive» des IgM
 
TherapieTraitement symptomatiqueAntibiotiques (doxycycline PO, ceftriaxone IV)
Prävention***Protection contre les piqûres de tiques avec des vêtements longs et des répulsifsVaccination FSME-Immun CC® ou ­Encepur® avec 95–99% de protectionProtection contre la piqûre de tique analogue à celle de la FSME, retrait de la tique à temps.Aucun vaccin n’est disponible.
* sur la base des recommandations de l’OFSP [2, 20]; ** voir notre discussion détaillée dans PHC 05/2022, ainsi que les recommandations suisses [36–39]; *** chiffres basés sur [21, 24, 27].

Diagnostic

Comment diagnostiquer la FSME?

Chez les patients non vaccinés, le plus souvent sur la base des anticorps spécifiques de la FSME dans le sérum (fig. 4) [16, 21, 24]. Important: les anticorps IgM ne sont généralement détectables qu’avec l’apparition de symptômes neurologiques (2e phase de la maladie) (environ 2 à 4 semaines après une piqûre de tique), les anticorps IgG encore 1 à 2 semaines plus tard [24, 25]. Par conséquent: en cas de forte suspicion et de sérologie initialement négative, répéter une sérologie 1 à 2 semaines plus tard.

Puis-je également diagnostiquer la FSME par PCR?

Ce n’est que pendant la phase grippale, avant l’apparition d’anticorps spécifiques, que la PCR FSME dans le sang peut être positive [16, 21, 24, 40]. Une PCR négative n’exclut toutefois pas une FSME et, de toute façon, il est rare que quelqu’un se présente chez son médecin de famille pendant la phase grippale. La PCR n’est donc guère appropriée pour le diagnostic de la FSME. Dans la deuxième phase (neurologique) de la FSME, le diagnostic par PCR n’est pas recommandé: la sensibilité est trop faible [40, 41].

Y a-t-il d’autres anomalies de laboratoire dans le sang?

Dans la phase grippale, on détecte souvent (10–70% [28, 42]; seulement chez 10–20% selon [43]) une leucopénie et/ou une thrombopénie, plus rarement (env. 20% [42]) une légère augmentation des transaminases. Pendant la phase neurologique, les leucocytes sont toutefois souvent élevés, de même que, parfois, la protéine ­C-réactive [16, 24, 44].

Comment diagnostiquer une FSME chez une ­personne vaccinée contre la FSME («percée vaccinale»)?

Chez les personnes vaccinées contre la FSME, on peut généralement détecter des anticorps IgG pendant des années [45]. Cela complique l’interprétation de la sérologie en cas de suspicion de percée vaccinale. Dans ce cas, des anticorps IgG isolés sont souvent détectables au début et augmentent relativement rapidement, tandis que les anticorps IgM n’apparaissent que tardivement [44–46]. Pour la confirmation d’une percée vaccinale, la ponction lombaire est considérée comme la méthode de référence (quotient des anticorps LCR:sérum élevé: «production intrathécale d’anticorps») [21, 24]. Il est possible que des méthodes de diagnostic alternatives soient dévelopée dans le futur, par exemple la mise en évidence dans le sérum d’anticorps neutralisants ou d’anticorps dirigés contre la protéine NS1 (protéine 1 non structurale) du virus FSME. Ces anticorps n’apparaissent qu’en cas d’infection active, pas après une vaccination [24, 47].
Figure 4: 
Diagnostic de la FSME. Evolution dans le temps chez les personnes non vaccinées, © Cécile Lanz.

Ma patiente, qui revient de Colombie avec de la fièvre et des douleurs articulaires, a la dengue. Mais les anticorps de la FSME sont également positifs. A-t-elle la dengue ou la FSME, ou les deux?

Des anticorps positifs à la FSME peuvent se produire en raison de réactions croisées contre d’autres flavivirus (notamment la dengue, la fièvre jaune, le virus Zika, le virus du Nil occidental, l’encéphalite japonaise). La sérologie ne permet donc pas toujours de distinguer de ­manière fiable la dengue et la FSME. Une anamnèse détaillée de la vaccination et la symptomatologie sont importantes (les symptômes neurologiques parlent en faveur de la FSME et contre la dengue [48]). Une PCR de la dengue, du Zika ou du chikungunya dans le sang peut apporter une clarté diagnostique, mais comme pour la FSME, la PCR redevient négative environ une semaine après le début des symptômes [48–51]. En cas de doute, il convient de procéder à une ponction lombaire (recherche de la production intrathécale d’anticorps FSME).

Faut-il effectuer une ponction lombaire chez tous les patients suspectés d’être atteints de FSME?

En principe oui, si la situation n’est pas encore claire et si d’autres diagnostics doivent être exclus (neuroborréliose, méningite virale et bactérienne) [21]. Une pléiocytose modérée (d’abord granulocytaire, puis lymphocytaire – nombre de cellules d’environ 30 à 300 cellules/µl) avec un quotient glucose normal (LCR: sérum >0,5) est typique de la FSME. Dans la majorité des cas, on constate une barrière hémato-liquide altérée [28, 45, 52]. Attention: les anticorps intrathécaux FSME ne sont détectables que dans environ 50% des cas au début des symptômes, mais 10 jours après le début des symptômes, ils sont détectables chez pratiquement tous les patients atteints de FSME [25, 45, 53].

Faut-il une IRM cérébrale?

L’IRM (imagerie par résonance magnétique) n’est anormale que chez environ 20% des patients atteints de FSME et n’est donc pas recommandée [54]. De plus, les résultats de l’IRM ne sont généralement pas spécifiques et ne sont pas en corrélation avec les différents symptômes ou la gravité de la maladie [55]. L’IRM peut toutefois être utile pour exclure d’autres diagnostics, comme l’encéphalite à herpès simplex [21, 24].

Thérapie et évolution

Ma patiente a unie FMSE confirmée. Comment puis-je la traiter?

Il n’existe pas de traitement causal de la FSME. Le traitement est symptomatique (analgésiques en cas de maux de tête ou de douleurs articulaires).

La FSME est-elle dangereuse?

La mortalité chez les adultes est d’environ 1% [28, 56, 57]. L’âge avancé (>60 ans), le sexe masculin et l’immunosuppression sont des facteurs de risque d’évolution grave. Dans une étude de 1999, près de la moitié des ­patients atteints de FSME et de méningo-encéphalomyélite ont été traités dans une unité de soins intensifs et 15% ont nécessité une ventilation mécanique [28].

Ma patiente se remettra- t-elle la méningo-­encéphalite à tiques sans séquelles?

Malheureusement, pas dans tous les cas. Après un an, plusieurs études ont montré que plus d’un tiers des patients présentaient encore des symptômes persistants, principalement des maux de tête, des problèmes de concentration ou de mémoire, de la fatigue ou une perte d’équilibre et de coordination (fig. 5) [57–62]. Alors que la méningite à FSME guérit généralement sans séquelles, environ 20% des patients atteints de méningo-encéphalite doivent s’attendre à des déficiences permanentes [24]. Dans de rares cas, des hémiparésies ou des paralysies des nerfs crâniens dues à la FSME peuvent également persisté.
Figure 5: 
Troubles résiduels à différents moments après une FSME. Reproduit de [62], avec l’aimable autorisation de Swiss Medical Weekly.

Peut-on prédire les séquelles?

La gravité de l’infection aiguë par la FSME joue un rôle: les déficits persistants sont rares 12 mois après une méningite pure, mais nettement plus fréquents après une méningo-encéphalite et surtout une encéphalomyélite [24].

Ma patiente est-elle immunisée à vie après une infection FSME?

Oui [21, 24, 63–65]. Des doses de vaccin «de rappel» ne sont pas nécessaires. En revanche, on peut contracter la borréliose plusieurs fois dans sa vie [66, 67].

Prophylaxie: Vaccination FSME

Comment puis-je me protéger contre les piqûres de tiques?

Nous en parlerons dans un prochain numéro de PHC. Par des vêtements clairs à manches longues et des pantalons, des chaussures fermées, des répulsifs. Ces mesures ne protègent pas à 100%. C’est pourquoi la protection la plus sûre contre la FSME et ses conséquences tardives est la vaccination.

Ma patiente est vaccinée contre la FSME. ­Peut-elle quand même contracter la FSME?

Aucun vaccin ne protège à 100% et l’efficacité de la série complète de vaccins contre la FSME (3 doses) est estimée à 95–99% [3, 20, 68]. Il existe de rares rapports de personnes isolées qui ont contracté la FSME malgré 3 doses de vaccin [23, 26, 69–71]. Important: le diagnostic de la FSME chez les personnes vaccinées est différent de celui des personnes non vaccinées (voir ci-dessus).

La vaccination est-elle vraiment utile?

Incontestablement, oui. L’Autriche vaccine contre la FSME depuis les années 1970, de sorte que plus de 80% de la population était bientôt vaccinée. Depuis, les cas de FSME ont pu être nettement réduits (de 500–700 cas/an à 50–60 cas/an) [72, 68].

Pour qui la vaccination FSME est-elle utile?

Avant 2006, l’OFSP ne recommandait la vaccination qu’aux personnes particulièrement exposées, mais depuis lors, elle le recommande à toutes les personnes qui vivent dans une zone à risque ou qui y séjournent temporairement [73] – par conséquent, à la plupart des habitants de la Suisse. La vaccination est particulièrement recommandée aux adultes et aux personnes âgées qui passent beaucoup de temps libre dans la nature et qui souhaitent se protéger avec un haut degré de certitude contre une maladie certes rare, mais potentiellement dangereuse et pouvant avoir des conséquences tardives.

La vaccination contre la FSME est-elle remboursée par l’assurance maladie?

Oui, dans le cadre de l’assurance de base [73].

Ma fille de 3 ans fréquente un groupe de jeu en forêt – ne devrais-je pas la vacciner également?

Les enfants et les adolescents ont généralement une évolution bénigne, sans ou avec peu de symptômes. C’est pourquoi l’OFSP ne recommande «en général» la vaccination qu’à partir de 6 ans [73]. Les évolutions neurologiques graves sont certes rares chez les enfants, mais elles existent [16, 20, 24, 74]. Chez les enfants et les adolescents également, des examens de suivi ont documenté des déficits neuropsychologiques chez jusqu’à un tiers d’entre eux [24]. Toute personne souhaitant vacciner son enfant d’un à cinq ans en raison d’expositions fréquentes aux tiques peut donc le faire [3]. En Autriche, la vaccination est recommandée à partir du premier anniversaire [75]. Dans les cabinets de pédiatrie, on observe que les parents veulent protéger leurs enfants, mais ne pensent souvent pas à eux-mêmes, ce qui serait encore plus utile.

Le taux de vaccination contre la FSME est-il en augmentation ces derniers temps?

Oui, et de manière nette [27]. Outre la recommandation de vaccination plus étendue de 2006, les taux de piqûres de tiques documentés grâce à la surveillance Sentinella jouent probablement un rôle, car ils sont régulièrement repris par les médias et rappellent cette thématique à la population [76, 77].

Pourquoi le schéma de vaccination n’est-il pas le même pour les deux vaccins?

Important: les intervalles de vaccination ont été fixés différemment par les deux entreprises lors des études d’autorisation, de sorte que les données ne sont disponibles que pour ces intervalles de vaccination et que les vaccins ne sont autorisés que de cette manière (fig. 6). Néanmoins, les deux vaccins sont interchangeables.
Figure 6: 
Schéma de vaccination contre la FSME; recommandations basées sur le Compendium [78, 79] et l'OFSP [73, 80], © Cécile Lanz

Quand est-on protégé par le vaccin?

Environ deux semaines après la 2e dose de vaccin [81]. La protection disparaît au bout d’un an environ si une 3e dose n’est pas administrée [82]. La 3e dose constitue donc déjà la 1re dose de rappel.

Le schéma rapide est-il vraiment aussi efficace que l’un des schémas standard?

En général, la réponse immunitaire à toutes les vaccinations peut être réduite si l’intervalle entre les vaccinations est trop court [75, 83]. Des études sur le schéma rapide FSME (fig. 6) montrent toutefois des résultats comparables à ceux des schémas standard [84, 85] – important: ne pas oublier la dose de rappel.

Mon patient a reçu deux doses de vaccin FSME il y a 8 ans. Dois-je recommencer depuis le début?

Non – il n’est pas nécessaire de «recommencer» en cas d’intervalles de vaccination «trop longs»: Chaque vaccination compte! Il suffit de donner la dose manquante (ici: la 3e) et de compléter ainsi la série de vaccinations [75, 83].

Quand faut-il se faire vacciner de nouveau?

L’OFSP recommande: tous les 10 ans [73, 86].

Pourquoi une vaccination de rappel (booster) est-elle recommandée en Allemagne après 3 ans, puis tous les 5 ans? 

Jusqu’en 2006, une vaccination de rappel était également recommandée tous les 3 ans en Suisse. Toutefois, des études, notamment suisses, montrent des taux d’anticorps FSME persistants pendant de nombreuses années [87–91]. Ainsi, en mars 2006, l’intervalle a été prolongé à 10 ans en Suisse, ce qui a permis d’augmenter l’acceptation de la vaccination [73, 90]. Des études récentes soutiennent cette recommandation [86, 92, 93].

En Allemagne et en Autriche, les intervalles entre les rappels sont plus courts chez les personnes âgées que chez les jeunes. Pourquoi?

Comme pour d’autres vaccins, les taux d’anticorps FSME ont tendance à diminuer plus rapidement avec l’âge (immunosénescence) [94, 95]. Concrètement, plus de 80% des patients présentant un «percée vaccinale» (FSME malgré vaccination correcte) ont plus de 50 ans [96]. C’est pourquoi, en Allemagne, un intervalle de rappel plus court est recommandé à partir de 50 ans (vaccin Encepur®) ou 60 ans (vaccin FSME-Immun®): tous les 3 ans au lieu de 5 ans. En Autriche, l’intervalle de rappel est de 3 ans à partir du 60e anniversaire, quel que soit le vaccin [75, 82]. Mais: la plupart des taux d’anticorps «bas» chez les plus de 50 ans se situent toujours dans une zone considérée comme protectrice [92]. En résumé, l’intervalle de rappel de 10 ans recommandé par l’OFSP semble toujours encore judicieux pour tous les groupes d’âge [86].

Mon patient veut faire la vaccination de rappel en fonction du taux d’anticorps – que’est que je lui dis?

En principe, cela n’est pas recommandé, car il n’existe à ce jour aucune valeur seuil définie pour les anticorps FSME qui garantisse une protection vaccinale [80, 82]. Certains experts ne partagent pas cet avis [87, 91]. Pour les personnes particulièrement exposées dans le cadre de leur profession (p. ex. les personnes travaillant en forêt), l’employeur (p. ex. le canton) finance souvent une détermination annuelle du taux des anticorps plus la dose de rappel si le taux tombe en dessous de la valeur seuil présumée protectrice.

Ma patiente est immunodéprimée et souhaite se faire vacciner contre la FSME. Le vaccin est-il quand même efficace?

Pas toujours. Comme pour d’autres vaccins, les personnes immunodéprimées ont un taux de séroconversion plus faible (35–55%) après la vaccination FSME par rapport aux personnes en bonne santé (95–99%) [3, 20, 97–99]. Une éventuelle infection FSME chez les personnes immunodéprimées peut en outre avoir une évolution plus grave [24, 100, 101]. Comme pour d’autres vaccins, si possible, vacciner avant l’immunosuppression et instruire les patients de bien se protéger contre les piqûres de tiques [101, 102].

Les vaccins FSME sont-ils sûrs?

En principe, oui [2, 82, 103]. Le vaccin avait autrefois mauvaise réputation en raison de ses fréquents effets secondaires, ce qui a entraîné une modification du processus de fabrication en 2000 [81]. Une étude de synthèse menée en 2009 auprès de plus de 8100 participants n’a révélé aucun effet secondaire grave [104]. Swissmedic décrit la tolérance comme étant similaire à celle des autres vaccins [105]. L’OFSP estime les réactions allergiques graves à 1–2 doses sur 1 000 000 et mentionne de très rares effets secondaires neurologiques graves pour 1:70 000 à 1:1 000 000 doses [20].

À quels effets secondaires dois-je m’attendre après une vaccination FSME?

Similaire à d’autres vaccins: Un tiers des personnes vaccinées ressent une rougeur, des gonflements ou des douleurs au point d’injection pendant 1 à 2 jours après la vaccination [20]. En outre, des maux de tête, de la fatigue, des arthralgies et plus rarement de la fièvre peuvent survenir [20, 82]. En général, les vaccins actuels (depuis 2001) provoquent moins d’effets secondaires qu’auparavant [103].

Puis-je administrer une prophylaxie post-expositionnelle FSME sous la forme d’un vaccin actif ou passif?

Non, la prophylaxie post-expositionnelle après une piqûre de tique n’est plus recommandée. Jusqu’en 2003, une vaccination passive (administration post-expositionnelle d’immunoglobuline spécifique à la FSME) était disponible, mais elle n’est plus autorisée en Europe en raison du manque de données sur son efficacité [21, 24]. La vaccination FSME active est également inefficace en post-exposition – le début de l’effet (induction d’anticorps neutralisants) prend malheureusement trop de temps. Certains experts craignent en outre que, comme pour la dengue, l’évolution d’une FSME déjà incubée puisse être influencée défavorablement par la vaccination [48, 106]. Après une piqûre de tique, le plan de vaccination autrichien ne recommande l’immunisation de base contre la FSME que 4 semaines plus tard.

L’essentiel pour la pratique

  • 85–95% des infections FSME sont asymptomatiques ou se présentent sous la forme d’une infection grippale non spécifique.
  • Seuls 5–15% des personnes infectées présentent une évolution biphasique avec des symptômes du SNC (20–50% de méningite, 40–55% de méningo-encéphalite, 3–10% de méningo-encéphalomyélite).
  • Une évolution grave et des complications neurologiques parfois permanentes sonst rares après la FSME et augmentent avec l’âge; les prévenir est la principale indication de la vaccination.
  • Chez les personnes non vaccinées, le diagnostic de la FSME est avant tout sérologique (anticorps IgM) – en cas de symptômes du SNC, une ponction lombaire est recommandée afin d’exclure d'autres diagnostics (neuroborréliose précoce, méningite bactérienne ou virale).
  • En cas de FSME malgré une vaccination correcte, le gold standard diagnostique est la ponction lombaire (détection de la production intrathécale d'anticorps FSME).
  • En raison des réactions croisées, la sérologie seule ne permet pas de distinguer de manière fiable une infection par la FSME, la dengue, la fièvre jaune ou le zika.
  • Jusqu'en 2000, le vaccin FSME avait mauvaise réputation (effets secondaires fréquents) – aujourd'hui, il est bien toléré (similaire aux autres vaccins).
  • Chaque vaccination compte: Même après de longs intervalles de vaccination FSME (pendant des années) et des doses manquantes, il suffit simplement de rattraper les doses manquantes.
Les auteurs n'ont pas déclaré de liens financiers ou personnels en rapport avec cette contribution.
Prof. Dr. med. Philip Tarr
Medizinische ­Universitätsklinik
Kantonsspital Baselland
CH-4101 Bruderholz
philip.tarr[at]unibas.ch
2 Bundesamt für Gesundheit (BAG). Frühsommer-Meningoenzephalitis (FSME). 2021 07.10.2021 [cited 2021 26.10.2021]; Available from: https://www.bag.admin.ch/bag/de/home/krankheiten/krankheiten-im-ueberblick/fsme.html
13 Rauer, S. and S. Kastenbauer. Neuroborreliose, S3-Leitlinie. Leitlinien für Diagnostik und Therapie in der Neurologie 2018 [cited 2021 30.10.2021]; Available from: https://dgn.org/wp-content/uploads/2013/01/030071_LL_Neuroborreliose_2018.pdf.
16 Lindquist, L. and O. Vapalahti, Tick-borne encephalitis. Lancet, 2008. 371(9627): p. 1861-71.
21 Taba, P., et al., EAN consensus review on prevention, diagnosis and management of tick-borne encephalitis. Eur J Neurol, 2017. 24(10): p. 1214-e61.
24 Kaiser, R., et al. Frühsommer-Meningoenzephalitis (FSME), S1-Leitlinie. Leitlinien für Diagnostik und Therapie in der Neurologie 2020 [cited 2021 26.10.2021]; Available from: https://www.awmf.org/uploads/tx_szleitlinien/030-035l_S1_Fruehsommer_Meningoenzephalitis_FSME_2020-02.pdf.
86 Schmidt, A.J., et al., Tick-borne encephalitis (TBE) in Switzerland: Does the prolongation of vaccine booster intervals result in an increased risk of breakthroughs? J Travel Med, 2021. taab158. doi: 10.1093/jtm/taab158